5. Microbiote pulmonaire.
C’est une notion récente (moins de 10 ans).
Avant que cette notion n’apparaisse pendant mes études, on répétait que le poumon était un milieu stérile. Les préjugés ont la vie dure car bien qu’identifié au XIX° siècle ce micro-biote ne figure pas dans le « projet de microbiome humain sain » de 2008 !
Il faut attendre 2010 avec la « méta-génomique »* pour admettre que les signaux détectés dans les parties basses du poumon ne sont pas en rapport avec une infection mais avec un « micro-biote pulmonaire commensal **»
*analyse quantitative rapide des marqueurs du génome
**une grande quantité de micro-organisme (bactéries, levures, virus et apparentés vivent dans notre organisme. Ils sont en équilibre avec nos systèmes immunitaires et collaborent au bon fonctionnement de nos cellules.
Mise en place et conséquences.
Le microbiote pulmonaire se met en place avant l’âge de 3 ans. Plus précisément en a peine 2 mois de vie l’environnement joue alors un grand rôle.
Dans les 5 mn suivant la naissance on détecte déjà une flore microbienne dans les espace rhinopharyngé ce kit de démarrage provient de la mère (origine vaginale, rectale, cutanée. Les microbiotes respiratoires sont différents selon les modalités de la naissance.
Dans une naissance standard (voie basse), il est composé de neisseria streptococus et d’anaérobies.
Une naissance prématurée est associée à ureoplasma par voie basse et, par staphylocoque après césarienne. Ces deux Kits de démarrage seront temporaires.
On observe une dysbiose majeure chez les grands prématurés avec diminution de Prevotela. Le lien entre le développement du microbiote et la résistance pulmonaire aux infections est démontré.
Une fois en place, le microbiote a des caractéristiques uniques par son étendue, par sa source microbienne (bucco dentaire, digestive, aéroportée). Il est dynamique : balance entre apport et élimination par l’escalator muco ciliaire*, l’immunité, la compétition inter bactérienne
* toutes les cellules de l’arbre respiratoire sont équipées d’un système de cils vibratiles qui, dans un mouvement ondulant et coordonné, font remonter depuis le fond des poumons jusque dans le larynx les agglutinats résultant de desquamation, de mort cellulaire, de phagocytoses qui ont lieu dans les profondeurs du poumon et pourrait obstruer les petites bronchioles indispensables aux échanges gazeux.
La densité bactérienne est faible, moitié moindre que celle du côlon, mais elle est beaucoup plus diversifiée (résilience forte).
Plus étonnant est le fait que beaucoup de ces bactéries qui sont anaérobies strictes (elles détestent l‘oxygène) constituent un cœur anaérobie au sein du poumon.
C’est la structure même du poumon qui permet cette option (nombreux replis de zone mal ventilée. Elles jouent un rôle dans la synthèse d’acide gras à chaines courtes ; de sphingolipides de quorum-sensing (communication entre bactéries.)
A coté de cet ensemble anaérobie, les autres familles sont représentées :micromycetes (champignon microscopique)levures, virus, archée(3° branche du vivant avec les eucaryote et les procaryote)Nous avons peu de connaissance dans ce domaine ,les connaissances viendront avec le développement de la meta-genomique »shotgun »qui vont analyser tous les fragments d’ADN présent quelle que soit la famille bactérienne. L’épidémie de COVID19 a permis le recueil de grandes quantités d’échantillons.
Protection du poumon.
Le microbiote permet le développement de zone d’échange plus efficace(expérience des souris axéniques*)
*souris expérimentale dépourvue de microorganisme)
Mais également le microbiote protège le poumon contre les infection. Soit par interaction directe entre bactérie, soit par stimulation du système immunitaire (expérience de souris axéniques)
Les acide gras à chaine courte produit par certaines bactéries stimulent l’activité des macrophages (gendarme de le l’organisme)la diapédèse* des polynucléaires la production d’interféron par les cellule épithéliale contre les virus respiratoires
*passage des polynucléaires à travers la membrane pulmonaire.
Une souris saine qui reçoit le microbiote nasal d’une souris souffrant de bronchopathie chronique, développe rapidement une hyper inflammation pulmonaire.
Comment le microbiote contribue-t-il à la stimulation du système immunitaire ? L’essentiel se passe dans la 1° semaine de la vie lorsque le système immunitaire se met en place.
Allergie
L’expérimentation animale montre que la richesse du microbiote respiratoire (les grandes familles bactériennes se mettent en place avec émergence des « bacteroidetes »
C’est cette dernière famille qui réduit considérablement les manifestations d’allergie aux acariens (hyperréactivité bronchique, hyper-éosinophilie)
L’apparition des anaérobies stimule l’apparition de lymphocyte T (régulateur de l’immunité) défaillant dans certain cancer pulmonaire.
Si la mise en place de ces deux lignes de défense anti allergique ne se fait pas, il est a craindre qu’une réactivité exagéré aux allergènes persiste jusqu'à l’âge adulte.
Le microbiote respiratoire est donc partie prenante des maladies respiratoires chroniques. Le rôle du micro-biote est fondamental dans les maladies comme Asthme, BPCO, mucoviscidose. (UNICEF)
La dysbiose pulmonaire se traduit par une augmentation des Protéobactéries (hemophilus, Branamella) au détriment des anaérobies bactéroides (prevotella veillonella et autres firmicutes dont l’importance est soulignée.
Les dessous de l’asthme.
Il s’agit d’une maladie multifactorielle concernant l’hôte, l’environnement- et le microbiote.
Par exemple : les enfants nés en milieu urbain sont plus à même de développer de l’asthme par rapport a ceux nés loin des villes.
Ce mode de vie dit « hygiéniste » comparé au développement de population « est- allemand » (avant la chute du mur) a permis d’observer que le développement des infections virales (bronchiolite, rhinovirus) de la petite enfance fait le lit de l’asthme.
Les infections virales perturbent l’interface hôte- micro-biote et favorisent la colonisation de l’oropharynx par des bactéries pathogènes (pneumocoque) et entraine une modification des réponses inflammatoires et de l’asthme.
Les maladies non chroniques : infections pulmonaires sont favorisées par les infections du micro-biote des voies aériennes supérieures et inférieures.
La colonisation des voie saériennes (pharynx) par pneumocoque, haemophilus, moraxella, est associée à un risque accru de pneumonie et de bronchiolite au cours des premières années de la vie.
Chez les adules hospitalisés en réanimation pour pneumonie grave, une diminution de la diversité du micro-biote est associée à une mortalité significative et ce facteur est indépendant de la nature et de l’espèce présentes dans le microbiote ainsi que des éléments de comorbidité.
COVID 19 et microbiote.
Le microbiote des malades de COVID est constamment déséquilibré.
Les seniors sont plus sensibles au COVID. En effet ,les bactéroïdes sont capables de modifier les composés qui aident les ligands* du SARS à s’associer à son récepteur ACE2.Le SARS Cov 2 ne peut donc plus se lier à son récepteur.
*protéine de liaison à la surface du SARS qui lui permet de s’arrimer à sa cible Mais la présence de cette bactérie protectrice disparait avec l’âge,ce qui facilite l’infection par le SARS
En résumé.
Pour qu’il soit pathogène, le SARS doit utiliser une « protéine de fixation présente à la surface du poumon ».
C’est précisément la fixation à cette protéine qui est bloquée par les « bactéroïdes » du microbiote : le SARS ne peut donc attaquer le poumon.
Mais cette bactérie diminue avec l’âge ce qui rend le sujet âgé plus fragile à l’attaque du virus.
On observe également le rôle protecteur du microbiote contre la tuberculose (un marqueur du microbiote est apparu qui pourrait aider au diagnostic de la maladie Les différents stade de la maladie correspondant à différent types de microbiote C’est également le cas du VIH chez ces patient la présence de pseudomonas est très souvent associée au BK et à une moins bonne réponse au traitement.
Avec des résultats moins spectaculaire on a pu étendre ce problème de dysbiose à d’autres pathologies comme le cancer du poumon, la maladie auto-immune associée a une diminution des anaérobies dans le microbiote.
Mais corrélation ne signifie pas causalité. Il faudra réaliser de nouveaux travaux pour établir un lien entre microbiote et maladie non bactérienne : évolution, pronostic. De la même façon que cela a été fait avec le microbiote digestif.
Axe intestin poumon.
En médecine chinoise : poumon et intestin sont un même système ; On montre aujourd’hui que le microbiote intestinal joue un rôle sur la santé pulmonaire (communication croisée).
Cet communication se ferait par l’échange de métabolites (acide gras à chaines courtes, endotoxines, cytokine, dans la circulation sanguine reliant les épithéliums intestinaux et pulmonaires.
La dysbiose intestinale serait responsable de maladies pulmonaires aiguës asthme, tuberculose cancer et, inversement ces maladies pulmonaires peuvent retentir sur l’intestin d’oû la « notion d’interférence intestin-poumon ce qui nous conduit la notion de collaboration inter microbiote »
Une étude récente montre que la grippe favorise la surinfection pulmonaire à pneumocoque par l’intermédiaire du micro-biote intestinal.
Le virus de la grippe agit sur le microbiote intestinal en réduisant la production d’acide gras a chaine courte, ce qui ralentit le travail des macrophages (globule blanc) pulmonaires sensés éliminer les pneumocoques.
Mieux, l’administration d’acétate en début de grippe restaure l’activité des macrophages.
Un essai thérapeutique réalisé dans des conditions satisfaisantes a montré que l’administration de pro-biotiques de type « lactobacillus » réduit du 1/3 les infections respiratoires du nouveau-né.
Une méta-analyse montre également qu’une alimentation saine réduit la prévalence de la bronchite chronique.
La prévention est plus que jamais nécessaire ; alimentation riche en fibres, pauvre en graisse, les acides gras à chaine courte qui régulent le microbiote, les pro-biotiques et autres nutriments présenteraient une stratégie efficace contre les maladie pulmonaire.s Il reste également à évaluer l’impact de nos modes de vie sur la diversité du microbiote pulmonaire.